lundi, décembre 28, 2009







Artistes Variés - Coca-Cola Jingles (1965; Acétate Marko; Audiodisc 4546)

Le lait de poule au réveillon, c'est dépassé. Cette année, trinquons du plus effervescent des nectars marrons: le Coca-Cola. On demeure pourtant dans l'esprit du Temps des Fêtes lorsqu'on considère que cette marque légendaire a toujours su se marchander efficacement, allant même jusqu'à populariser l'image commercialement viable du Père Noël que nous connaissons tous aujourd'hui. En fidélisant ses consommateurs à une image, voire une couleur, la populaire boisson eut tôt fait de pétiller sur les ondes radiophoniques. En s'acoquinant des étiquettes de disques internationales, ils recrutèrent un nombre impressionnant de groupes pop et d'artistes du palmarès pour les inviter à reprendre le jingle officiel du cola, Things go better with Coca-Cola. Les versions sont aussi inventives que stylistiquement diverses, question de mieux s'identifier à la jeune génération, des teenyboppers aux hippies assumés. Toujours autour d'un même refrain, des groupes pour la plupart UK & US tels les Bee Gees, The Who, The Left Banke et autres Vanilla Fudge relevèrent la barre en signant des arrangements colorés et plutôt raffinés. L'ami-blogueur Claude du site L'Homme Scalp vous propose d'ailleurs un article à propos d'une compilation de ces meilleures bande-annonces radios des années 60. Du lot, j'en ai retenu quelques-uns, tous tirés cette fois-ci des compilations du groupe de discussion U-Space, Psychedelic Promos & Radio Spots Vol. 1-9.



Petite rivière de cola deviendra grand fleuve... En conquérant le marché international, la compagnie cibla rapidement ses campagnes localement. La vague yéyé alors déferlante au Québec de 1965 eut tôt fait d'attirer l'attention du géant qui flairait une bonne affaire dans le marché francophone. L'association fit même la manchette de l'édition du 7 août 1965 du magazine Billboard. On y apprend entre autres que le groupe montréalais J.B. & the Playboys avait été approché, tout comme des habitués du palmarès de la scène francophone: en plus de Pétula Clark (Vogue), César et les Romains (Choc), Les Baronets (Jeunesse Franco) et Les Cailloux (Capitol) sont cités. Avoisinant une photo culte de Sam the Sham & the Pharaos, le tout ne manque pas de piquer la curiosité!

On souligne que ces indicatifs pourraient être utilisés au Québec comme aux États-Unis lorsque les artistes effectueront une percée sur les palmarès américains. Un rêve que convoitaient toujours certains, mais qui ne se concrétisera malheureusement pas (ok, presque avec Les Jérolas et leur double performance au Ed Sullivan Show).


Pour diversifier leur palette sonore et assurer une diffusion massive de leur nouvelle campagne, on recruta simultanément des artistes de différentes étiquettes comme Jenny Rock (Select), le groupe folk Les Quatre-Vingts (Columbia), Robert De Montigny (Trans-Canada) ainsi que Margo Lefebvre (Trans-Canada). Reprenant la formule des indicatifs anglophones, Coca-Cola opta pour un monstre de la chanson française et demanda à ses nouveaux porte-parole d'imaginer leur propre version de Y'a d'la joie de Charles Trenet. Ce titre deviendrait ainsi -tant dans la presse écrite que radiophonique- le nouveau et pétillant slogan publicitaire du breuvage. Avec Coca-Cola, y'a d'la joie... Fallait y penser.



Même Serge Laprade a enregistré sa version du jingle en 1967.

Cette acétate réalisée par les Studios Marko Inc. regroupe la plupart des nom cités plus haut, sur une seule face (l'autre étant vierge). Comme la campagne se renouvelait sans cesse, la diffusion de ces jingles de 60 secondes était purement immédiate et prévisiblement éphémère. Le choix du format « acétate » pour les campagnes radiophoniques pourrait partiellement s'expliquer par des frais de conception minimes et délibérément limités couplés de la faible durée de vie du médium. C'est qu'elles sont fragiles ces acétates, n'offrant qu'une mince couche de vinyl sur un disque d'aluminium. Une fine couche qui dégénère à chaque écoute... Le format était aussi largement prévilégié avant l'arrivée du ruban magnétique. Des EP (ou super-45 tours) furent aussi produits, où deux artistes y proposaient quatre versions différentes du même jingle. J'ai pu répertorier un EP jumelant Les Jérolas aux Quatre-Vingts; qui sait, peut-être en existe-t'il plusieurs autres?

Le tout démarre rapidement avec deux dynamiques versions folks, gracieuseté des Cailloux et des Quatre-Vingts. Alors que ces derniers demeurent plutôt sages, la bande à Jean Fortier fait fi de la bière d'épinette et garde une cadence éffreinée pour une histoire de braconnier qui achète les garde-chasse avec quelques bouteilles de Coca-Cola. Cocasse. On sort ensuite des boîtes à chanson pour se réfugier en boîtes de nuit sur un jerk de Jenny Rock. Entre quelques cuivres, la voix éraillée de la pétillante chanteuse à de quoi séduire sur cette version calquant du même coup sa propre reprise de Walking the dog de Rufus Thomas. Parlant de séduction, c'est Robert De Montigny qui tonifiera ensuite votre cola d'une touche de rhum par ses airs joyeusement kitsch de samba. Coca Gogo, on crie Bravo! quand on boit un Coca-Cola.



Margo Lefebvre bénéficia d'arrangements plus élaborés pour son jingle, me portant à croire qu'il fut probablement enregistré pendant les sessions pour son album Gala 65. L'orchestration est vitaminée à la manière d'un tube du Swinging London et nous fait oublier les lentes ballades qui ont pourtant fait la marque de la chanteuse. Pour leur part, César et les Romains demeurent fidèles au yéyé sur une version énergique et efficace, mais sans grandes surprises. La frivolité de la mélodie de Trenet sied parfaitement au style des Jérolas, pimenté de quelques cuivres. Leur aventure carbonisée ne s'arrêterait pas là, le duo tournant son dos quelques années plus tard à Coca-Cola pour endosser la bière Laurentide, mais aussi... Pepsi. L'Acétate prend fin sur une charmante version de 90 secondes chantée par la francophile Pétula Clark, à l'accent toujours aussi craquant. Un sourire, un Coke, oh les jeunes, quelle merveille; été comme hiver, le Coke est sans pareil.

Rien de tel pour terminer l'année en beauté que cette rare trouvaille parmi les plus effervescente! Je tiens à remercier chaleureusement l'ami Otis pour la numérisation de cette délicate acétate. Laissez un commentaire en téléchargeant.


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